Capitaine DARET Claude Edmé

     L’insurrection des 5 et 6 juin 1832, à Paris, a provoqué des drames, y compris parmi les vainqueurs. C’est ainsi que le capitaine Claude-Edme DARET, du 38e de ligne, sera tué le 61, le jour même où il devait se marier à Versailles. Il faut dire que le 38e avait été appelé en renfort de cette ville. On lit dans Le Constitutionnel2:
          M. le capitaine DARET du 38e de ligne était en garnison à Versailles. Il devait se marier le 6 de ce mois avec une jeune personne de cette ville ; le 5 au soir, son régiment est appelé à Paris, il est forcé de le suivre et d’ajourner ses noces à quelques jours. Le 6 juin, M. DARET est à la tête de sa compagnie, il se porte avec elle partout où le danger l’appelle; le combat était à sa fin, quelques coups de fusils partaient encore, sans qu’ils inquiétassent autrement la troupe, et c’est l’un de ces coups qui traverse la tête du capitaine et l’étend raide mort. Ainsi c’est le jour même destiné à un mariage qui devait être heureux, que M. DARET succombe par une balle française, lui qui avait affronté celles de l’ennemi dans les campagnes de 1813, 1814 et de 1815. 


Dans le Journal des débats on lit3:
          … ce matin. La garde nationale a conduit le cercueil de M. DARET, capitaine au 38e régiment de ligne : dernier et touchant témoignage de cette fraternité des deux armes qui ne finit qu’au cercueil. La mort du capitaine DARET est un des plus terribles épisodes de cette longue et triste journée du 6 juin, qui a pris sa place à côté de nos journées les plus sanglantes. Quatre compagnies du 38e avaient été envoyées dans la rue Saint-Martin pour enlever une barricade. Après une attaque de quelques heures, ces compagnies se retiraient faute de cartouches, quand le capitaine DARET fit enfoncer par les sapeurs la porte de plusieurs maisons d’où partait un feu meurtrier. Pendant ce temps il se portait lui-même par la rue Quincampoix sur les barricades de la rue Aubry-le-Boucher. Il enleva plusieurs de ces barricades. La dernière de toute paraissait inabordable; outre qu’elle était d’une prodigieuse hauteur4, elle était défendue par un feu croisé et très nourri. Cependant rien ne put arrêter le capitaine et ses voltigeurs. La barricade fut emportée; mais le capitaine DARET y demeura: il a été enterré aujourd’hui…

Suit le texte d’un discours verbeux de M. ANDRYANE de la CHAPELLE, commandant le 1er bataillon de la 11e légion.

Le capitaine DARET était né à Tonnerre (89) le 21 janvier 1796 de Jean Baptiste et de Catherine Louise BARRAULT, son épouse5. L’autorisation de mariage était arrivée le 30 mai 1832. Il s’agissait de Louise Adélaïde Désirée MARTIN de MAUPERTUIS, 29 ans, fille naturelle de Marie-Adélaïde MARTIN de MAUPERTUIS, veuve de Jacques Claude de BROSSARD. La promise était honorablement connue et apportait en dot 9 000 fr en capital et 2 284 Fr en rente sans compter 36 000 Fr d’espérance (héritage maternel).

Notes
1 Cf. Pièces relatives aux journées des 5 et 6 juin 1832, Revue rétrospective. Recueil de pièces intéressantes et de citations curieuses. Nouvelle série. Huitième semestre (Juillet-Décembre 1893), T. XIX, pp. 95, 147 ; Courage et générosité : Le 38e de ligne pendant les insurrections de 1832, pp. 58-61 de : Notes sur l'éducation morale du soldat : 13e corps d'armée. 25e division. 49e brigade. 38e régiment d'infanterie.- Lyon : imp. de Pelletier, 1879, p. 60
2 Cf. Le Constitutionnel, Journal du commerce, politique et littéraire, dimanche 10 juin 1832, Numéro 165, p. 2, colonne 3
3 Cf. Journal des débats politiques et littéraires, dimanche 10 juin 1832, p. 2, colonne 3
4 Cf. Bouchet (Thomas).- La barricade des Misérables In : La barricade : Actes du colloque organisé les 17, 18 et 19 mai 1995 par le Centre de Recherches en Histoire du XIXe siècle et la Société d’histoire de la révolution de 1848 et des révolutions du XIXe siècle ; ss la dir. de Alain Corbin et Jean-Marie Mayeur.- Paris : Publications de la Sorbonne, 1997, pp. 125-135 ISBN 2-85944-318-5
5 Au Service Historique de la Défense, dossier GR 2Ye 1008



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